(On pourrait croire qu’elle a perdu la bataille)

Elle vivait comme chacun
Sa petite vie routinière
Regardant passer un à un
Les différents jours de misère

Mais au fond d’elle une lumière
Faisait reluire les ténèbres.
Où se trouve donc le mystère ?
D’où vient cette fin si funèbre ?

Elle est partie à la dérive
Et le départ d’une force vive
L’a laissée entièrement libre
A jamais : la fiancée du Tibre

Chaque jour, si vous la cherchiez
Il vous suffisait de vous rendre
Sur ce pont où elle passait
Le contemplant de cet air tendre

Toutes ces atteintes vécues
L’habitude qui l’étouffait
Et l’indifférence invaincue
De tous ces passants aveugles

Elle est partie à la dérive
Et le départ d’une force vive
L’a laissée entièrement libre
A jamais : la fiancée du Tibre

Dans son regard chargé d’amour
Pour son beau futur ondoyant
Il y avait écrit « Toujours »
Et : « Achève donc mon tourment

Si je ne puis plus supporter
Que chaque matin ne soit pas
Le premier de l’éternité
Que les hommes ne s’aiment pas ! »

Elle est partie à la dérive
Et le départ d’une force vive
L’a laissée entièrement libre
A jamais : la fiancée du Tibre

Elle allait ainsi déclamer
Attendant le moment choisi
Où enfin il l’appellerait
Exigeant le don de sa vie

Le fleuve lui a ouvert ses bras
Lui a réclamé son trépas
Osez donc dire qu’elle a eu tort !
Qui sombre dans l’amour : dans la mort !

Elle est partie à la dérive
Et le départ d’une force vive
L’a laissée entièrement libre
A jamais : la fiancée du Tibre

(Aviez-vous jamais vu plus belles fiançailles ?)

Syrtlean (1993)